Jean Sibelius
Le grand homme de la musique finlandaise, héros de la cause nationale en peu contre son gré. Après avoir été formé à Helsinki, Berlin et Vienne, Jean Sibelius compose sa première œuvre marquante avec Kullervo en 1892, et devient très vite la personnalité musicale la plus importante d’un pays qui n’a pas encore acquis son indépendance. Inspirée comme Kullervo par la grande épopée finlandaise du Kalevala, la Suite de Lemminkainen en 1896 (avec notamment son épisode central Le Cygne de Tuonela) confirme le talent d’orchestrateur du jeune homme qui est désormais prêt pour se tourner vers la grande symphonie. La Symphonie n°1 voit ainsi le jour en 1899, au moment où le musicien reçoit une rente annuelle des autorités finlandaises, pour lui permettre de concentrer toute son énergie à la composition. Face à la répression tsariste qui s’intensifie, Sibelius prend les armes, défend la presse libre finlandaise, et en tire Finlandia en 1900, qui devient rapidement l’hymne national officieux de son pays. La décennie qui s’ouvre sera marquée par des œuvres où le style de Sibelius s’affermit : Symphonies n°2 et 3, Concerto pour violon, La Fille de Pohjola, Chevauchée nocturne et Lever de soleil , la musique de scène Kuolema (qui contient la fameuse Valse triste), le Quatuor à cordes « Voces Intimae ».
En 1911, sa Symphonie n°4 suscite stupeur et incompréhension : l’austérité, la sévérité, la concentration du matériel musical s’opposent à la vision cosmogonique de l’univers mahlérien. Vivant isolé dans sa petite maison d’Ainola, il s’enferme dans son œuvre durant la Première Guerre mondiale, en se concentrat sur la Symphonie n°5, qui connait de nombreuses versions. Côté politique, Sibelius voit enfin son rêve réalisé avec l’indépendance de la Finlande, proclamée en 1917 au moment de la révolution russe. La Symphonie n°5 est enfin créée dans sa version définitive en 1919, bientôt suivie des Symphonies n°6 et n°7. La reconnaissance est désormais internationale et Sibelius, qui tirait un temps le diable par la queue, est à l’abri du besoin, entre pension d’état, collecte populaire et dons généreux. A la fin des années 1920 pourtant, Sibelius est à la peine. Buveur important, il ne peut plus contenir ses mains tremblantes, et n’arrive pas à achever une Symphonie n°8, pourtant promise au chef Serge Koussevitzky. Sibelius s’enferme alors pour les trente années qu’il lui reste à vivre dans une retraite silencieuse, à peine contredite par quelques réarrangements ou petites pièces.