27 avril 2018
Les interprètes : Quatuor Arod, Guillaume Bellom
CESAR FRANCK (1822-1890)
Quintette pour piano, deux violons, alto et violoncelle en fa mineur (1879)
Molto moderato quasi lento
Lento con molto sentimento
Allegro non troppo ma con fuoco
A l’instar d’un Rameau devenu célèbre grâce à ses opéras composés sur le tard, Franck doit sa notoriété à des œuvres de sa cinquantaine : sa Symphonie, ses Variations symphoniques, sa Sonate pour violon et piano et son Prélude, Choral et Fugue. Le Quintette pour piano et cordes, achevé en 1879, s’inscrit assurément sur cette liste et définit le style de son auteur. Qui dit Franck pense cycle. Son quintette se soumet en effet à sa loi, celle d’une idée qui revient régulièrement comme « l’idée fixe » de la Symphonie fantastique de Berlioz et réapparaît dans chaque mouvement. Le compositeur ne la dévoile pas tout de suite. Il fait précéder l’Allegro d’un Molto moderato quasi lento tourmenté, presque désespéré. Le motif est pourtant banal : une simple descente de gamme, allongée d’une tierce, par les cordes qui prend une allure tragique (la partition demande dramatico et fortissimo) par ses brusques saccades dues aux notes doublement pointées donc inégales. Le piano répond par un thème consolateur entrecoupé de silences mais le ton reste foncièrement inquiet. Après que la ligne descendante a glissé d’un archet à l’autre, le piano ouvre l’Allegro par un thème également en rythme pointé. Le premier violon énonce enfin le thème principal, chromatique, qui semble tourner sur lui-même et fait alterner valeurs brèves (croches) et longues (blanches) dans un climat Tenero ma con passione (tendre mais avec passion). Avec un long développement le thème réapparaît et laisse la place à une conclusion d’abord bruyante qui peu à peu s’éteint dans le silence que trouent des accords du piano. Le mouvement central, Lento, con molto sentimento, repose sur une idée principale, exposée dès la première mesure par le premier violon au-dessus d’accords réguliers du piano. Malgré son quasi monopole, elle ne pourra pas empêcher le retour du thème cyclique. Le finale s’élance con fuoco dans une course éperdue marquée par le bourdonnement des deux violons avant que n’apparaisse le premier thème, nerveux, énoncé par les cordes. Une seconde idée, souvenir du mouvement précédant, s’y ajoute avant que ne revienne, après une longue attente, le thème cyclique. Le finale achève en un fa majeur triple forte un quintette débuté en fa mineur. Cette pièce marque une des premières tentatives de la musique de chambre française à vouloir se hisser au niveau de sa cousine allemande alors représentée par Brahms qui avait, lui aussi composé un quintette avec piano en fa mineur.