7 août 2018
Les interprètes : Quatuor Girard
LUDWIG VAN BEETHOVEN (1770 – 1827)
Quatuor à cordes n° 11 opus 95
Beethoven est animé d’une nécessité intérieure quand il compose en 1810 son onzième quatuor à cordes. L’œuvre ne répond pas à une commande, n’est pas destinée à une publication immédiate (elle patientera six ans dans un tiroir) et n’est pas dédiée à quelque important aristocrate mais à un obscur ami intime, Nikolaus Zmeskall von Domanovecz, qui semble avoir été présent auprès du compositeur pendant cette période viennoise difficile. L’année précédente, la capitale a subi un siège, un bombardement et une occupation par les troupes françaises ; dans le même temps, les projets de mariage de Beethoven aboutissent à un échec qui l’affecte fortement. Dans ces circonstances, le compositeur écrit un « quartetto serioso » traversé par une émotion puissante, presque dévastatrice.
Tendue, concentrée, l’œuvre s’élance sans préambule : un trait d’une violence soudaine précède un cri du premier violon en octaves brisées. Dans un premier mouvement concis, le discours oscille entre dépression (de longues lignes mélodiques font entendre des intervalles plaintifs) et révolte (des gammes abruptes viennent mettre un terme aux différentes sections). Beethoven ne s’encombre pas de longues transitions et insère des modulations brusques qui entretiennent un climat irrespirable.
Le mouvement lent commence sur la pointe des pieds et une mélodie touchante émerge. Une fugue introspective se déploie en deux parties. Volutes sinueuses et chromatismes tendus viennent écarteler l’harmonie dans cette page d’une grande mélancolie.