27 juillet 2019
Les interprètes : Le Consort, Adèle Charvet
GEORG FRIEDRICH HAENDEL (1685 – 1759)
Sonate en trio pour deux violons et basse continue en si mineur HWV 386b
Le recueil des Sonates en trio opus 2 montre l’influence de l’Italie sur Georg Friedrich Haendel et suit le modèle des sonates da chiesa, avec quatre parties alternant mouvements lents et pages vives. Au-dessus de la pulsation régulière de la basse continue, les deux violons se suivent dans un Andante au rythme pointé omniprésent. Après un Allegro ma non troppo au contrepoint subtil, le Largo s’ouvre dans un caractère alangui emprunté à un opéra de Reinhard Keiser, Octavia. Tandis que le second violon se joint à la basse continue, le premier se lance dans une aria touchante que Haendel reprendra dans son opéra Agrippina en 1709. La sonate s’achève dans un Allegro aux imitations ludiques.
GEORG FRIEDRICH HAENDEL (1685 – 1759)
Cantate Agrippina condotta a morire en do mineur HWV 110
Avant de connaître son premier grand succès à Venise avec l’opéra Agrippina, Haendel se consacre essentiellement à l’écriture de cantates. Dans ces pièces lyriques miniatures, le compositeur peut se livrer à toutes sortes d’expérimentations avant de se confronter au roi des genres musicaux. La cantate Agrippina condotta a morire peut ainsi être considérée comme le germe de l’opéra à venir. Après avoir conspiré pour installer sur le trône son fils Néron, Agrippine apprend que celui-ci va la faire assassiner. C’est à cet instant que commence la cantate. Entrecoupés de récitatifs, les cinq airs et ariosos explorent une riche palette d’affects allant de la lamentation maternelle (« Come, o Dio ! ») au désir de vengeance (« Renda cenere il tiranno »).
JOHN ECCLES (1668 – 1735)
The Mad Lover pour violon et basse continue (1700)
Contemporain de Henry Purcell (1659-1695), John Eccles était considéré comme le meilleur compositeur pour le théâtre en Angleterre autour de 1700, quelques années avant l’arrivée de Haendel. Dans The Mad Lover, pièce écrite par John Fletcher en 1647, Eccles conçoit des airs et des interludes qui renforcent les affects de l’ouvrage théâtral et montrent une parfaite maîtrise du style italien.
GEORG FRIEDRICH HAENDEL
Cantate Lucrezia HWV 145
Introduit en Italie par l’intermédiaire de la puissante famille de Médicis en 1706, Haendel se trouve très tôt au contact des meilleurs musiciens du pays, que ce soit à son arrivée à Florence ou dès la fin de l’année à Rome, au sein de la fameuse Académie de l’Arcadie. Ces conditions idéales lui permettent d’imaginer des œuvres virtuoses, comme la cantate Lucrezia : intervalles larges et déchirés, vocalises agiles, figuralismes qui surlignent le texte… La partition est particulièrement exigeante pour la chanteuse. L’enjeu est d’exprimer les sentiments les plus violents : violée par l’un des fils du roi, Lucrèce exprime le vertige de ses tourments intérieurs qui la mèneront au suicide, après avoir appelé les dieux à punir son agresseur.
ANTONIO VIVALDI (1678 – 1741)
Sonate en trio pour deux violons et basse continue n°1 opus 1 en sol mineur
Juditha triumphans RV 644 « Veni, veni me sequere fida »
Sonate pour deux violons et basse continue n°12 opus 1, RV 63 « La Follia »
Juditha triumphans RV 644 « Armatae face et anguibus »
Né à Venise, Antonio Vivaldi tient son surnom de « Prêtre roux » à son ordination en 1703. Il ne dira pourtant pas longtemps la messe. Accédant la même année au poste enviable de maestro di violino à l’Ospedale della Pietà (un institut religieux chargé de l’éducation des orphelines), il se trouve bientôt en situation de diriger – et de composer pour – un orchestre et un chœur de très grande qualité. Ses premières œuvres éditées datent de cette époque et se tournent vers le genre le plus répandu : la sonate en trio. Le célèbre Arcangelo Corelli (1653-1713) en a érigé les plus grands modèles : publiée en 1700, sa Sonate opus 5 n° 12 « La Follia » reste aujourd’hui encore une des plus célèbres pièces pour le violon baroque.
Dans sa Sonate opus 1 n° 12 publiée cinq ans plus tard, Vivaldi reprend la boucle harmonique en ré mineur, héritage de la follia populaire, et compose à son tour des variations savantes qui annoncent ses nombreux concertos virtuoses pour l’instrument.
Sa Sonate en trio opus 1 n° 1 suit le plan conventionnel en quatre brefs mouvements, entendu en première partie de concert avec Haendel. Vivaldi leur ajoute parfois des noms de danse, typiques des sonates da camera. Si le Grave émeut par la puissance expressive de ses dissonances, l’allemande Allegro qui suit fait entendre des jeux d’imitation efficaces qui montrent l’aisance violonistique du compositeur. Après un Adagio construit comme un choral contemplatif, l’Allegro final, en deux parties (Capriccio puis Gavotta), met en avant le premier violon et apporte une conclusion enlevée à l’ensemble.Une dizaine d’années après la publication de ces sonates, Vivaldi reçoit la commande d’un oratorio pour célébrer la victoire de Venise sur les Turcs qui assiégeaient Corfou.
Quelques mois plus tard, en novembre 1716, Juditha triumphans est créé à l’Ospedale della Pietà. Le livret en latin de Jacop Cassetti reprend le récit de l’Ancien Testament : alors qu’Israël subit le siège des Assyriens, Judith, une jeune femme juive, part à la rencontre du général ennemi et implore sa pitié. Holopherne tombe amoureux et abaisse sa garde ; après l’avoir fait boire et manger abondamment, Judith le décapite dans son sommeil et revient apporter la victoire à Béthulie. Cet oratorio est le seul qui nous reste de Vivaldi. Son traitement plus opératique que sacré, son expressivité sensuelle (voire érotique), sa puissance lyrique ont marqué des générations de compositeurs. Ce soir, deux airs en sont extraits : dans « Veni, veni me sequere fida », Judith s’adresse doucement à sa servante Abra pour la rassurer face au danger ; dans « Armatae face et anguibus », c’est le bras droit du général assyrien, Vagaus, qui lance un appel aux Furies pour venger le meurtre.
avec l’aimable autorisation d’Alpha Classics alpha-classics.com