Zoltán Kodály
Le compagnon de route de Béla Bartók bien sûr… mais pas seulement ! On aurait en effet tort de réduire Zoltán Kodály à son travail méticuleux de recension des chants folkloriques hongrois, roumains ou transylvains entrepris avec son ex-camarade de l’Académie de musique de Budapest et qui ont offert une vitrine inédite à l’ethnomusicologie au début du vingtième siècle. Des traces de cette activité se retrouvent bien sûr dans ses propres compositions, mais, comme le précise Bartók au sujet de son ami, son art « a jailli aussi bien du sol paysan hongrois que de la musique française moderne » pour produire une œuvre qui exprime d’abord « calme et méditation ». Après avoir été nommé professeur de théorie à l’Académie de Budapest en 1907, Kodály va notamment s’illustrer dans le domaine de la musique de chambre, avec des pages pour cordes décisives, comme les deux quatuors à cordes, le Duo pour violon et violoncelle, la superbe Sonate pour violoncelle seul, digne pendant des Suites de Bach dans un répertoire ô combien exigeant, ou l’étonnante Sérénade pour deux violons et alto. L’autre versant de son catalogue est constitué par de la musique vocale, profane ou sacrée, avec ou sans accompagnement, où les éléments folkloriques sont intégrés de façon plus visible. Dans ses œuvres de plus grande ampleur, signalons le très patriotique Psalmus Hungaricus et la délicieuse comédie d’Háry János, plus connue aujourd’hui dans sa déclinaison en suite orchestrale, ainsi que les irrésistibles Danses de Marosszék, et de Galanta, le Concerto pour orchestre ou les Variations sur le Vol du Paon. Au moment où le régime de son pays se compromet de plus en plus avec l’Allemagne hitlérienne, la voix de Kodály, bien qu’isolée, continue à porter. La création au sortir de la guerre de sa Missa Brevis, composée dans les sous-sols de l’opéra de Budapest pendant les bombardements soviétiques, marque la fin de cette période troublée. Autre domaine investi par Kodály, celui de la pédagogie, où, bien qu’elle ne soit pas totalement créée par lui, la « méthode Kodály » progresse dans tout le pays inspirée par les idées du compositeur : musique considérée comme une langue maternelle à développer, grande place accordée au chant choral (mais avec des pièces de qualité !) dès la petite enfance avant le premier contact avec l’instrument, pratique quotidienne… Un beau programme à suggérer à nos élites politiques ! Jusqu’à sa fin paisible à l’âge de quatre-vingt-quatre ans, les deux dernières décennies de Kodály seront en tout cas celles des honneurs : éditions successives de son grand corpus sur la musique populaire hongroise, présidences diverses assurées par le compositeur, docteur de l’université d’Oxford, tournées triomphales jusqu’aux Etats-Unis.