Mauricio Kagel
On a de Mauricio Kagel l’image d’un compositeur potache, qui s’est notamment amusé à déconstruire toute la tradition musicale, comme dans son fameux Ludwig van, un film qui explique comment Beethoven est devenu un objet de consommation sur une bande-son en forme d’habile montage des œuvres du maître. La réalité est bien sûr plus complexe : certes, Kagel a pris un malin plaisir à imaginer d’incroyables types de jeu, et a enrichi sa palette orchestrale avec des objets plus improbables les uns que les autres, mais il a surtout révolutionné le théâtre musical, en montrant comment ce genre hybride à la croisée des arts pouvait se révéler stimulant. Après des années de formation en Argentine où il montre une parfaite connaissance des techniques sérielles et de l’écriture incorporant bandes et sons concrets, il frappe ainsi très fort peu de temps après son arrivée en Europe avec Sur Scène, bientôt suivi par Journal de théâtre, Antithèse, Match, Staatstheater. Permutations, improvisations, changements d’instruments, de discipline : tout est permis pour Kagel, qui fait un principe de la porosité entre les genres. Musique de chambre, pour la scène, films, pièces pour la radio, l’œuvre de Kagel est immense et a influencé plusieurs générations à travers notamment les cours de « musique nouvelle » à Cologne dans les années 1970 et sa chaire de théâtre musical créée spécialement à son intention.