3 mai 2013
Les interprètes : Pierre Fouchenneret, Guillaume Chilemme, Adrien La Marca, Adrien Boisseau, Edgar Moreau, Yan Levionnois, Guillaume Bellom
Deux quintettes au programme de ce deuxième concert de l’édition 2013 du festival de Pâques de Deauville, mais deux formations différentes puisqu’au juvénile et rare Quintette avec piano de Camille Saint-Saëns succédait une partition de Mendelssohn où, à l’instar du modèle mozartien, un deuxième alto venait compléter le quatuor à cordes traditionnel.
Etonnante page que ce Quintette avec piano d’ailleurs, fruit d’un musicien de vingt ans à peine, fêté comme un virtuose du clavier dans toute la bonne société parisienne dès l’âge de onze ans. Quand tous ses confrères ne rêvent que d’opéra, le jeune Saint-Saëns lui s’abreuve à la source des romantiques allemands et compose une œuvre où planent les ombres de Schumann, Mendelssohn et qui met en permanence le pianiste à rude épreuve. Aussi vieux que Saint-Saëns à l’époque, Guillaume Bellom se tire de toutes les embuches de ce concerto-miniature, bien épaulé par un quatuor mené du violon par Pierre Fouchenneret. Du sang neuf après l’entracte : Pierre Fouchenneret et son complice Guillaume Chilemme restent, l’altiste Adrien Boisseau également, mais Yan Levionnois cède sa place à son camarade de conservatoire Edgar Moreau. Adrien La Marca, un de nos meilleurs à l’alto et remplaçant au pied levé Antoine Tamestit, rejoint ses camarades dans le vigoureux 2e Quintette de Mendelssohn, l’une de ses dernières œuvres chambristes achevées avant le poignant 6e Quatuor de 1847, requiem à la mémoire de sa sœur Fanny mais aussi le chant du cygne du compositeur. Fidèle à sa manière, Mendelssohn livre dans son Quintette une synthèse idéale entre l’équilibre classique et la féérie romantique, synthèse parfaitement rendue par nos cinq musiciens.
Tous deux enfants prodiges, Saint-Saëns et Mendelssohn distribuaient leurs dons dans la composition, le piano, l’orgue, la direction d’orchestre et la chronique musicale. Cette précocité ne les a pas préservés d’une encombrante réputation de classiques, c’est-à-dire d’affreux réactionnaires. L’un et l’autre ont en effet confié leur muse à la tutelle des aînés, notamment de Bach, Mozart et Beethoven. Un lien entre ces deux artistes pourtant fort dissemblables, de caractère, de style et de longévité (le Français meurt octogénaire tandis que l’Allemand n’atteint pas les quarante ans) est pourtant assuré par le pianiste Camille-Marie Stamaty, élève de Mendelssohn, qui instruisit le jeune Saint-Saëns.
Quand ce dernier compose, à vingt ans, son quintette pour piano et cordes, la France du Second Empire semble n’avoir d’oreilles que pour l’opéra. La musique de chambre semble rester l’apanage des pays germaniques alors qu’elle constitue un des grands axes de son œuvre. Il laisse en effet dix sonates, deux trios avec piano, deux quatuors à cordes qui participeront au renouveau du genre en France. Le jeune homme dédie ce quintette opus 14 à « [S]a grande tante Madame Masson, née Gayard » qui lui avait donné ses premières leçons de piano. L’instrument y joue un rôle essentiel, presque soliste, comme dans un concerto. Aussi est-ce lui qui ouvre l’Allegro moderato e maestoso par des puissants accords forte aux accents douloureux que prolongent les quatre archets piano à l’unisson. Il aura également droit à une cadence soliste, comme dans un concerto, et prend souvent part à l’exposé des idées principales, solennelles et affirmatives de ce mouvement touffu. Après une conclusion fortissimo par des accords qui rappellent l’introduction, c’est à nouveau le piano qui ouvre, seul, l’Andante sostenuto aux allures de choral revu par Schumann. Les cordes répondent d’une même voix avant que l’alto se détache du groupe pour faire entendre le second thème. Le troisième mouvement commence, toujours au piano, par une succession de vagues pianissimo de doubles croches, à la main gauche seule puis aux deux mains, avant d’être bousculé par de violentes secousses qui semblent se souvenir du premier mouvement. Le geste léger de ce Presto aux allures de mouvement perpétuel n’est pas sans rappeler le style des scherzos de Mendelssohn. Ce quintette vigoureux et affirmatif s’achève par un fugato où, pour une fois, le piano cède la place aux cordes qui entrent l’une après l’autre, du grave (le violoncelle) à l’aigu (premier violon).
A cette page de jeunesse succède une œuvre de la maturité. Mendelssohn s’attaque en effet à son quintette l’été 1845. Quelques mois plus tôt, il avait fait entendre son concerto pour violon. Peut-être la proximité de cette pièce désormais très célèbre a-t-elle influencé le caractère éminemment concertant de cet opus 87. Confié comme par Mozart à deux violons, deux altos et un violoncelle, ce quintette fait en effet la part belle au premier violon qui se comporte souvent en soliste. C’est ainsi lui qui dessine l’ascension vigoureuse du premier thème, solidement appuyée sur les notes fondamentales de l’arpège, tandis que les quatre autres instruments bourdonnent en trémolos. Après un passage en triolets obstinés et le retour de la première idée surgit la seconde, plus introspective, présentée par le premier alto puis le premier violon qui s’aventurera ensuite dans des acrobaties sur les quatre cordes dignes d’un concerto. Après le développement, introduit par le violoncelle vers des zones d’ombre, la coda travaille les deux idées principales avant la conclusion virtuose dominée par les triolets fortissimo du premier violon. Après le tumulte de cet Allegro vivace à 2/2, Mendelssohn ne laisse pas les musiciens ni le public respirer. A la quiétude d’un mouvement lent, il préfère un Andante scherzando, donc plus animé, où se répondent deux idées, la première en mineur, la seconde en majeur, dansant d’un pied ailé sur une mesure à 6/8. Après ce qui pourra passer en définitive pour un intermède (délicieuse conclusion en pizzicato), se présente enfin le mouvement lent, Adagio e lento en ré mineur, dont la gravité et l’intensité douloureuse font définitivement mentir la trop célèbre formule de Debussy caricaturant Mendelssohn en « notaire élégant et facile ». La fin du mouvement s’achève néanmoins dans le soleil de ré majeur et de douces ombres pianissimo. Le premier violon reprend sa position de meneur au tout début du finale, Allegro molto vivace, par une montée et descente en doubles croches qui rappelle le début du quintette mais il est très vite rejoint par les autres instruments qui caracolent sur des montagnes russes de croches et doubles croches créant ainsi une sorte de mouvement perpétuel. Les deux altos présentent le second thème, plus nostalgique. La conclusion est amenée par l’effet papillonnant continu du début puis marquée par quatre accords fortissimo.
Tous deux enfants prodiges, Saint-Saëns et Mendelssohn distribuaient leurs dons dans la composition, le piano, l’orgue, la direction d’orchestre et la chronique musicale. Cette précocité ne les a pas préservés d’une encombrante réputation de classiques, c’est-à-dire d’affreux réactionnaires. L’un et l’autre ont en effet confié leur muse à la tutelle des aînés, notamment de Bach, Mozart et Beethoven. Un lien entre ces deux artistes pourtant fort dissemblables, de caractère, de style et de longévité (le Français meurt octogénaire tandis que l’Allemand n’atteint pas les quarante ans) est pourtant assuré par le pianiste Camille-Marie Stamaty, élève de Mendelssohn, qui instruisit le jeune Saint-Saëns.
Quand ce dernier compose, à vingt ans, son quintette pour piano et cordes, la France du Second Empire semble n’avoir d’oreilles que pour l’opéra. La musique de chambre semble rester l’apanage des pays germaniques alors qu’elle constitue un des grands axes de son œuvre. Il laisse en effet dix sonates, deux trios avec piano, deux quatuors à cordes qui participeront au renouveau du genre en France. Le jeune homme dédie ce quintette opus 14 à « [S]a grande tante Madame Masson, née Gayard » qui lui avait donné ses premières leçons de piano. L’instrument y joue un rôle essentiel, presque soliste, comme dans un concerto. Aussi est-ce lui qui ouvre l’Allegro moderato e maestoso par des puissants accords forte aux accents douloureux que prolongent les quatre archets piano à l’unisson. Il aura également droit à une cadence soliste, comme dans un concerto, et prend souvent part à l’exposé des idées principales, solennelles et affirmatives de ce mouvement touffu. Après une conclusion fortissimo par des accords qui rappellent l’introduction, c’est à nouveau le piano qui ouvre, seul, l’Andante sostenuto aux allures de choral revu par Schumann. Les cordes répondent d’une même voix avant que l’alto se détache du groupe pour faire entendre le second thème. Le troisième mouvement commence, toujours au piano, par une succession de vagues pianissimo de doubles croches, à la main gauche seule puis aux deux mains, avant d’être bousculé par de violentes secousses qui semblent se souvenir du premier mouvement. Le geste léger de ce Presto aux allures de mouvement perpétuel n’est pas sans rappeler le style des scherzos de Mendelssohn. Ce quintette vigoureux et affirmatif s’achève par un fugato où, pour une fois, le piano cède la place aux cordes qui entrent l’une après l’autre, du grave (le violoncelle) à l’aigu (premier violon).
A cette page de jeunesse succède une œuvre de la maturité. Mendelssohn s’attaque en effet à son quintette l’été 1845. Quelques mois plus tôt, il avait fait entendre son concerto pour violon. Peut-être la proximité de cette pièce désormais très célèbre a-t-elle influencé le caractère éminemment concertant de cet opus 87. Confié comme par Mozart à deux violons, deux altos et un violoncelle, ce quintette fait en effet la part belle au premier violon qui se comporte souvent en soliste. C’est ainsi lui qui dessine l’ascension vigoureuse du premier thème, solidement appuyée sur les notes fondamentales de l’arpège, tandis que les quatre autres instruments bourdonnent en trémolos. Après un passage en triolets obstinés et le retour de la première idée surgit la seconde, plus introspective, présentée par le premier alto puis le premier violon qui s’aventurera ensuite dans des acrobaties sur les quatre cordes dignes d’un concerto. Après le développement, introduit par le violoncelle vers des zones d’ombre, la coda travaille les deux idées principales avant la conclusion virtuose dominée par les triolets fortissimo du premier violon. Après le tumulte de cet Allegro vivace à 2/2, Mendelssohn ne laisse pas les musiciens ni le public respirer. A la quiétude d’un mouvement lent, il préfère un Andante scherzando, donc plus animé, où se répondent deux idées, la première en mineur, la seconde en majeur, dansant d’un pied ailé sur une mesure à 6/8. Après ce qui pourra passer en définitive pour un intermède (délicieuse conclusion en pizzicato), se présente enfin le mouvement lent, Adagio e lento en ré mineur, dont la gravité et l’intensité douloureuse font définitivement mentir la trop célèbre formule de Debussy caricaturant Mendelssohn en « notaire élégant et facile ». La fin du mouvement s’achève néanmoins dans le soleil de ré majeur et de douces ombres pianissimo. Le premier violon reprend sa position de meneur au tout début du finale, Allegro molto vivace, par une montée et descente en doubles croches qui rappelle le début du quintette mais il est très vite rejoint par les autres instruments qui caracolent sur des montagnes russes de croches et doubles croches créant ainsi une sorte de mouvement perpétuel. Les deux altos présentent le second thème, plus nostalgique. La conclusion est amenée par l’effet papillonnant continu du début puis marquée par quatre accords fortissimo.