György Kurtág
Héritier à la fois de Bartók et Webern, György Kurtág doit à
Pierre Boulez une bonne part de la reconnaissance tardive dont il bénéficie
depuis le début des années 1980. Envoyées à cette époque au comité de lecture
de l’ensemble Intercontemporain, les Messages de feu Demoiselle Troussova
étonnent le compositeur français par leur qualité et le métier d’un compositeur
dont on ignorait tout en Occident. Il faut dire que, même de l’autre côté
Rideau de fer, Kurtág avait su rester discret, se consacrant pleinement à son
poste d’enseignement à l’Académie de musique de Budapest, là même où il fut
formé au sortir de la Seconde Guerre mondiale par Sandor Veress, Ferenc Farkass
ou Leo Weiner. Il y eut déjà cependant une période française au milieu des
années 1950, permettant à Kurtág de se familiariser avec la modernité musicale
d’alors et de suivre les cours de Milhaud et Messiaen. Trouvant dans la petite
forme ou l’aphorisme issus de Webern son terrain d’élection, Kurtág compose
peu, mais des œuvres denses, ramassées, rendant fréquemment hommage à toute
l’histoire de la musique, de la Renaissance à Bartók. Outre Les Dits de
Peter Bornemisza, les Messages de feu Demoiselle Troussova
Ou les Chants sur des poèmes de Janos Pilinszky faisant
tous appel à la voix humaine, il faut absolument retenir dans son œuvre
l’imposant massif des Jatekok (« Jeux » en hongrois),
un recueil pédagogique pour piano qui prolonge les leçons du Mikrokosmos
de Bartók, l’exception orchestrale que constitue Stele (commandée par
Claudio Abbado pour l’orchestre de Berlin), et pour quatuor à cordes les Microludes
opus 13. Vivant actuellement dans le sud de la France, il travaille
depuis des années sur un opéra inspiré par Fin de partie de Beckett, et dont la
création a été maintes fois repoussée.